Les liens entre le manque de sommeil, le surpoids et l'obésité

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Article mis a jour le 22.06.2023
Le manque de sommeil favorise l’augmentation des prises alimentaires. Dérégulation du système hormonal, dérèglement métabolique : un déficit chronique de sommeil est un facteur clé de surpoids. Pour bénéficier d’heures de sommeil suffisantes et de qualité, l’alimentation peut être un allié stratégique.

« Qui dort dîne » : cet adage tendrait à nous faire penser que le sommeil nous fait oublier la faim. Les études montrent plutôt le contraire. En revanche, ce dont on est certain, c’est que les interactions entre le sommeil et l’alimentation sont nombreuses et plutôt subtiles. Pour mieux comprendre celles-ci, il nous faut prendre conscience du rôle stratégique des hormones, qui interviennent à la fois pour réguler notre sommeil et notre appétit.

Hormones et sommeil : un impact considérable

Le sommeil lui-même dépend d’un équilibre subtil entre deux hormones :
  • le cortisol, l’hormone de l’éveil,
  • la mélatonine, l’hormone du sommeil.

Ces deux hormones sont dites antagonistes, c’est-à-dire qu’elles ont un fonctionnement opposé. Notre corps est programmé pour se reposer la nuit. Ces hormones fonctionnent donc sur un rythme circadien, rythme biologique de 24 heures, respectant l’alternance jour/nuit. La mélatonine est surtout produite pendant la nuit, avec un pic vers 3 h du matin pour décroître progressivement jusqu’au réveil.
La sécrétion de cortisol augmente, quant à elle, dans la seconde partie de la nuit. Elle atteint son taux maximal au matin, entre 6 h et 8 h du matin, pour décroitre jusqu’au soir où son taux est minimal.

Sommeil, jeûne et hormones

Le sommeil est la plus longue période de la journée sans prise alimentaire. Pendant la nuit, le dormeur jeûne. La sécrétion des hormones qui régulent l’appétit suivent un rythme circadien calé sur l’alternance jour/nuit et destiné à faciliter cette période de jeûne.

Deux hormones principales qui commandent l’appétit sont à l’œuvre :

  • la leptine qui génère la sensation de satiété,
  • la ghréline qui génère la sensation de la faim.

Ces hormones jouent un rôle important dans la régulation de notre métabolisme et de notre poids. La sécrétion de la leptine est à son maximum la nuit. Elle augmente en début de soirée avec un pic vers minuit. Elle est à son plus bas niveau le jour, notamment en début d’après-midi.
La ghréline, l’hormone antagoniste de la leptine est au contraire essentiellement sécrétée le jour avec trois pics à 8 h, 13 h et 18 h.

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Quand le sommeil fait défaut

Ce schéma correspond à un mode de vie idéal, des heures de sommeil suffisantes, respectant l’alternance naturelle jour/nuit. Dans la réalité, nos habitudes viennent quelque peu bouleverser cet équilibre.
Première donnée : nous dormons moins. Oui, oui, ce constat est général et nous affecte tous, hommes, femmes, enfants. D’après les chiffres de l’Inserm, nous dormons en moyenne une 1h30 de moins qu’il y a 50 ans [1]. Un français sur 3 dort moins de 6 heures par nuit [2], un chiffre largement en dessous dès 7 heures minimales recommandées pour une bonne récupération [3].
Cette carence de sommeil a de multiples causes : horaires de travail décalés, augmentation des temps de transports, nouvelles habitudes de divertissements, recours massif aux écrans… En effet, la lumière bleue diffusée par les écrans stimule fortement la rétine et dérègle notre horloge interne, ce qui retarde la production de mélatonine, nécessaire à l’endormissement. Le travail en horaire décalé ou de nuit désynchronise le rythme circadien. En outre, il augmente la glycémie en fin de nuit et diminue la sécrétion d’insuline [4].

Le manque de sommeil favorise les fringales et le grignotage

Le déficit de sommeil altère aussi les mécanismes de régulation des hormones de l’appétit. Le manque chronique de sommeil augmente les niveaux de ghréline et réduit les niveaux de leptine [5]. Ces dérégulations ouvrent l’appétit et incitent à manger davantage [6].
En outre, la fatigue consécutive à des nuits trop courtes incite à rechercher de l’énergie. Elle invite inconsciemment à augmenter le nombre de calories ingérées comme à multiplier les prises alimentaires.
Les restrictions de sommeil augmentent également l’appétit pour la consommation d’aliments gras et sucrés.
Enfin, cette fatigue incite à moins bouger, ce qui ralentit d’autant le métabolisme. Autant de causes potentielles de surpoids [7].

Sommeil et surpoids

Le manque de sommeil perturbe également la sécrétion d’autres hormones également responsables de la régulation de la prise alimentaire. En effet, le manque de sommeil dope la production en cortisol, favorisant la prise de poids [8]. C’est également un facteur de développement de résistance à l’insuline et son corollaire le stockage des graisses [9].

Le manque de sommeil provoque une dérégulation du métabolisme glucidique [10]. L’action de l’insuline baisse de 50 % (résistance à l’insuline) et la production d’insuline est réduite de 30 % (diminution de l’insulo-sécrétion [11]). Cette situation crée un terrain favorable à l’apparition d’un diabète 2 (intolérance glucidique ou prédiabète) ou à son aggravation. Il crée aussi un terrain favorable à l’apparition d’un syndrome métabolique [12].

Les personnes en surpoids doivent en première intention interroger la qualité de leur sommeil. La mauvaise qualité du sommeil peut en effet être à l’origine d’un dérèglement hormonal et d’une spirale continue de prise de poids. Parmi les troubles du sommeil, la piste de l’apnée du sommeil doit être privilégiée, particulièrement en cas de ronflement.

Ce qu’il faut retenir :

  • Le manque de sommeil altère les mécanismes de régulation des hormones.
  • Cette dérégulation peut causer un désordre métabolique et favoriser l’apparition d’un diabète de type 2
  • Le manque de sommeil favorise la prise de poids.
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Dr Thierry CASTERA, rédacteur médical
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Sources

[1] https://www.inserm.fr/dossier/sommeil
[2] Léger D. & Bourdillon F. Le déclin du temps de sommeil en France n’est pas une fatalité ; résultat du baromètre de santé publique France (2019), Bull. Epidemiol. hebd., 2019 ( 8-9), p.146-148.
[3] Léger D. et al. Le temps de sommeil, la dette de sommeil, la restriction de sommeil et l’insomnie chronique des 18-75 ans : résultat du baromètre de santé publique France (2019), Bull. Epidemiol. hebd., 2019 (8-9), p.149-160.
[4] https://www.atousante.com/risques-professionnels/horaires-travail/consequences-travail-horaires-decales-metabolisme
[5] Spiegel K, Tasali E, Penev P, Van Cauter E. Sleep curtailment in healthy young men is associated with decreased leptinlevels, elevated ghrelin levels, and increased hunger and appetite. Ann Intern Med (2004),14, p. 846-50.
[6] SpiegelK., TasaliE., PenevP. & Van Cauter, E. Sleep curtailment in healthy young men is associated with decreased leptin levels, elevated ghrelin levels, and increased hunger and appetite. Ann Intern Med 2004;141: 846-850.
[7] Anne G Wheaton, Geraldine S Perry, Daniel P Chapman, Lela R McKnight-Eily, Letitia R Presley-Cantrell, Janet B Croft, Relationship between body mass index and perceived insufficient sleep among U.S. adults: an analysis of 2008. BMC Public Health, 2011, 11:295.
[8] Spiegel K., et al. Leptin levels are dependent on sleep duration: relationships with sympathovagal balance, carbohydrate regulation, cortisol, and thyrotropin. The Journal of clinical endocrinology and metabolism (2004); 89, p.5762- 5771.
[9] Spiegel K., Tasali E., Leproult R. & Van Cauter, E. Effects of poor and short sleep on glucose metabolism and obesity risk. Nature reviews (2009) Vol.5, p.253-261.
[10] Spiegel K., Tasali E., Leproult R. & Van Cauter, E. Effects of poor and short sleep on glucose metabolism and obesity risk. Nature reviews 2009; 5: 253-261.
[11] https://www.federationdesdiabetiques.org/information/complications-diabete/diabete-et-sommeil;
[12] Association d’un taux élevé de triglycérides, de l’hypertension et d’un faible taux de bon cholestérol « HDL ».