Quels liens entre les anti-dépresseurs et l'apnée du sommeil ?

31.07.2023

Auteur du texte: L'équipe SleepDoctor

Contrairement aux idées reçues, sommeil et antidépresseurs ne font pas toujours bon ménage. Cette classe de médicament couramment prescrite, comme certains anxiolytiques, peut provoquer un trouble respiratoire du sommeil : l’apnée du sommeil.

Plus d’un Français sur 5 a déjà pris un antidépresseur. Ces médicaments qui font partie de la catégorie psychotropes agissent sur le psychisme. Schématiquement, les antidépresseurs ont une activité sur les neurotransmetteurs monoaminergiques présents dans le cerveau comme la sérotonine, la noradrénaline et la dopamine. Ils sont indiqués pour les troubles d’humeur comme la dépression, mais également pour des troubles anxieux, des troubles obsessionnels compulsifs, des troubles du sommeil, voire même des douleurs neurologiques (ATC) sans que les scientifiques comprennent parfaitement comment ils agissent.

Comme tous les médicaments, les antidépresseurs peuvent avoir des effets secondaires. Ils sont notamment susceptibles d’être à l’origine de troubles respiratoires du sommeil comme l’apnée du sommeil [1]. On vous explique pourquoi.

Les antidépresseurs peuvent provoquer des épisodes d’apnée centrale du sommeil

Les centres respiratoires sont des centres nerveux localisés dans le tronc cérébral qui ont pour fonction de stimuler le mouvement respiratoire et d’adapter sa fréquence en fonction du besoin en oxygène et de la quantité de gaz carbonique à évacuer du sang. Lorsque ces centres dysfonctionnent ou lorsqu’ils reçoivent des informations perturbées, la respiration n'est plus stimulée, ce qui peut conduire à l'insuffisance respiratoire. Or, les antidépresseurs peuvent avoir une action sur ces centres respiratoires en les déprimant (oui, oui vous avez bien lu… mais cela ne veut pas pour autant dire pas dire que prendre un antidépresseur est déprimant). L’effet dépresseur des antidépresseurs sur le système respiratoire est d’ailleurs bien connu des médecins. C’est pourquoi ils peuvent être à l’origine d’épisodes d’apnée centrale du sommeil (ACS).

Bon à savoir : Les médicaments de la famille des benzodiazépines prescrits contre l’anxiété comme le Xanax, le Tranxene, le Valium etc... qui peuvent par ailleurs être prescrits dans le cadre de troubles du sommeil ont le même effet dépresseur sur les centres respiratoire que les antidépresseurs. Les benzodiazépines sont donc eux aussi susceptibles de générer des épisodes d’apnée centrale du sommeil.

Les antidépresseurs peuvent provoquer des épisodes d’apnée obstructive du sommeil

Autre effet secondaire bien documenté des antidépresseurs : la prise de poids [2]. Ces prises de poids peuvent avoir pour conséquence des apnées obstructives du sommeil ou syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS), un trouble qui se manifeste par des arrêts involontaires de la respiration pendant la nuit. Le SAHOS est fréquent et sous diagnostiqué. En effet, près de 5% des Français souffrent d’apnée du sommeil [3], [4].

Bon à savoir :
Là encore, les médicaments de la famille des Benzodiazépines présentent les mêmes effets secondaires que les antidépressseurs. Ces anxiolitiques peuvent favoriser la prise de poids et l’apparition de SAHOS, trouble respiratoire du sommeil. Un comble lorsque l’on sait que les benzodiazépines sont largement prescrits pour lutter contre les troubles du sommeil, comme l’insomnie, par exemple !
Vous souffrez peut-être d’apnée du sommeil
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Une piste prometteuse : un antidépresseur qui traite l'apnée du sommeil ?

Avant de vous jeter le contenu de votre armoire à pharmacie à la poubelle, restez encore un peu avec nous ! En effet, et de façon paradoxale, les scientifiques s’intéressent de près en ce moment à une molécule de la famille des antidépresseurs : la réboxétine. Ce médicament constitue une des pistes actuelles pour lutter contre l’apnée du sommeil. Il permettrait de réduire la sévérité du SAHOS en augmentant le tonus des muscles du muscle pharyngé, en améliorant le contrôle respiratoire et en facilitant l’ouverture des voies aériennes supérieures. Non seulement, il limiterait le nombre d’épisodes d’apnée par nuit mais il augmenterait également le taux d’oxygène dans le sang. Une vraie bonne nouvelle pour tous les patients concernés par ce trouble respiratoire du sommeil.

À retenir :
- Les antidépresseurs peuvent provoquer des épisodes d’apnée centrale du sommeil.
- Les antidépresseurs peuvent générer un SAHOS.
- Les Benzodiazépines provoquent les mêmes effets secondaires que le SAHOS en matière d’apnée du sommeil.
- Un antidépresseur, la réboxétine, vient récemment d’être identifié comme une piste prometteuse pour lutter contre l’apnée du sommeil [5].
Sources

[1] Linselle M, et al. « Apnées du sommeil d’origine médicamenteuse » 37es Journées de pharmacovigilance. 19-21 avril 2016. Fundam Clin Pharmacol 2016 ; 30 (suppl.1).
[2] Serretti A., Mandelli L. Antidepressants and body weight: a comprehensive review and meta‑analysis. J Clin Psychiatry (2010), Vol,7, p.1259‑72.
[3] 4,9% de personnes déclarent souffrir d’un SE-SAHOS, Le syndrome d’apnée du sommeil en France : un syndrome fréquent et sous-diagnostiqué, C. Furhman et al., BEH 44-45, 20 novembre 2012, p. 511.
[4] L’apnée obstructive du sommeil (SAOS) constituent la très grande majorité des apnées du sommeil, loin devant l’apnée centrale du sommeil (ACS).
[5] Lim R., The noradrenergic agent reboxetine plus antimuscarinic hyoscine butylbromide reduces sleep apnoea severity: A double-blind, placebo-controlled, randomised crossover trial, The Journal of Physiology (2021), 599, p. 4183-4195.